• Du Sud de Ginza vers Ryogoku en longeant la Sumida - partie 1

    Oui, ça fait un sacré chemin.... c'est plutôt agréable quand il fait beau.

     

    On commence notre route pas très loin de la station Yurakucho.

    A l'époque d'Hiroshige il y avait :

    Du Sud de Ginza vers Ryogoku en longeant la SumidaN°114 びくにはし雪中 Bikunihashi setchū, le pont Bikuni sous la neige.  

    Aujourd'hui, pas très loin du palais impérial, à l'époque c'était la demeure du shogun, le pont Bikunibashi est situé près de la douve extérieure Sotobori et passe par-dessus la rivière Kyobashi (cherchez pas, tout à disparu !). Normalement, bikuni désigne les nonnes et dans certains cas, comme ici, les prostituées qui se travestissaient en nonne pour mieux passer inaperçue (Whoopi Goldberg dans Sister Act n'avait rien inventé !).

    On imagine Ginza avec tous ses magasins de luxe aux articles hors de prix mais ce que nous montre cette estampe, c'est que le quartier abrite surtout des maisons de passe, des endroits où l'on mange à bas prix, des yatai. En effet, la pancarte à gauche indique yama kujira "baleine des montagnes" ce qui désigne de la viande d'animaux sauvages : sanglier, cerf mais aussi tanuki, et j'entends le loup, le renard et la belette... La consommation de viande est proscrite dans le bouddhisme mais malgré tout tolérée.A droite, ce sont des patates douces qui sont vendues et un marchant ambulant traverse le pont.

    Bref, à l'époque, c'est un lieu mal famé.

    De nos jours, c'est une entrée d'autoroute.

     photo DSCN6721_zpse1cd5374.jpg

    On continue direction la rivière et on tombe sur :

    Du Sud de Ginza vers Ryogoku en longeant la SumidaN°73 市中繁栄七夕祭 Shichū han'ei Tanabata matsuri, la ville prospère , le festival de Tanabata 

    Les seules choses qui prospèrent dans le quartier, ce sont les buildings et les affaires.

    Cette estampe aurait été faite depuis le toit de la maison d'Hiroshige. On y voit la tour des pompiers du district de Yayosu, c'est la charge qu'il exerçait (oui, on peut-être pompier et avoir une âme d'artiste) et qu'il légua à son fils.

    Ici on retrouve les bambous où on accroche les différentes décorations pour célébrer tanabata comme un filet de pêche, des serpentins et aussi d'autres ornements moins habituels comme une courge, une tranche de pastèque ou une courge.

    Aujourd'hui, c'est un bâtiment de la compagnie Bridgestone qui occupe le lieu.

    Du Sud de Ginza vers Ryogoku en longeant la SumidaN°76 京橋竹がし, Kyōbashi Takegashi, le quai des bambous et le pont de Kyōbashi  

    C'est l'estampe qui marqua Whistler dans sa série de nocturnes (v. le vieux pont de Battersea) et permis l'introduction du japonisme dans la peinture. Par la suite, les motifs japonais et les compositions des estampes influencèrent les impressionnistes.

    Le quartier autour de kyobashi (le pont de la capitale) était à l'époque occupé par divers corps de métiers : teinturiers, chaudronniers, etc... Près du pont lui-même, se trouvaient les charbonniers et l'endroit se nomma Sumicho. Cependant, ils partageaient l'endroit avec les vendeurs de bambous. Ce sont d'ailleurs ces entrepôts de bambous que l'on voit sur la partie gauche de l'estampe. La demande a toujours été très forte et le bambou sert dans la construction, pour les palissade, mais aussi dans la fabrication du kadomatsu en fin d'année et pour les hampes de Tanabata comme vu dans l'estampe précédente. Les hampes d'ailleurs ont vu leur taille augmenter durant l'ère Edo. Il semblerait qu'avant, seules des petites branches étaient utilisées pour Tanabata mais fin du 19ème siècle, on mit de hauts mâts sur le toit des maisons.

    Sur le pont surmonté de giboshi indiquant son importance, on peut voir des pèlerins qui reviennent du mon Oyama. L'un d'eux porte une lampe avec l'inscription Horitake qui serait un clin d'oeil pour Yokogawa Horitake, un graveur d'estampe avec qui travailla souvent Hiroshige. Le jeu de mot était facile, take signifiant bambou.

    Adieu bambous ! Bonjour asphalte et béton !

    Ceci dit, il y a toujours un pont.

    Pas très loin, on trouve une stèle commémorative en l'honneur de Nakamura Kenzaburo, fondateur du Nakamura-za, l'une des trois principales salle de théâtre kabuki d'Edo et aussi le premier d'une trèèès longue lignée d'acteurs.

     photo DSCN6715_zps8d550152.jpg

     On continue vers la Sumida, mais on fait une petite boucle vers le Sud direction le pont de Tsukuda Oohashi.

    Du Sud de Ginza vers Ryogoku en longeant la Sumida - partie 1N°78 , 鉄砲洲築地門跡, Teppōzu Tsukiji Monzeki, Teppozu et le temple de Tsukiji Monzeki

    Teppozu est surtout le nom d'un banc de sable sur la Sumida. A l'époque d'Hiroshige, il n'y a pas grand chose dans le coin : on y a installé les courtisanes sorties des quartiers rouges, bien sûr ceux qui les entretiennent ne sont pas bien loin car il y a les maisons des riches militaires avant qu'au 19ème s. les étrangers y élisent domicile.

    La principale activité se résume, comme on peut le voir avec les bateaux au premier plan, à la pêche.

    Et là, ça devrait faire tilt avec le titre : pêche - Tsukiji.

    Oui, c'est ce à quoi ressemblait Tsukiji à l'époque d'Hiroshige.

    Certes, maintenant le grand marché à disparu pour s'installer à Toyosu. Comme quoi, Tokyo est en perpétuelle mutation. Cependant, à l'époque l'attraction principale n'était pas encore le marché mais le temple dont le toit accroche le regard au fond de l'estampe.

    C'est le Nishi-Honganji. Là aussi cela devrait vous être familier si vous êtes déjà allé à Kyoto car c'est un des temples principaux de la ville.

    Or en 1617, une annexe s'installe à Edo.... mais pas là où il se trouve sur l'estampe puisqu'au départ le temple était à Asakusa. Jusqu'à l'incendie de 1657. Le shogunat interdit sa reconstruction car il avait d'autres projets. Comme une grande majorité des adeptes de l'école Jodo-shinshu, le courant de pensée du temple de Hongan-ji, vivent à Tsukudajima (notamment une grande majorité de pêcheurs d'Osaka), le temple est reconstruit sur ces terres.

    D'ailleurs, cela se retrouve aussi dans le nom de Tsukiji dont les kanji se lisent comme "terre aménagées".

    Et là, vous allez me dire que c'est pas le bon temple, le nom est différent... En fait, le temple s'appelle jusqu'en 1923 Tsukiji Gobo, Hiroshige le nomme Monzeki. C'est la même signification : un temple d'une grande importance dirigé ou fondé par un chef religieux.

    1923 c'est la date du grand séisme du Kanto, le Hongan-ji actuel fut achevé en 1934. Il est d'ailleurs assez impressionnant avec son architecture qui imite une sorte de temple indien. Mais à l'époque d'Hiroshige aussi il était en reconstruction suite à une grande tempête. C'est peut-être pour ça que nous n'en avons pas plus de détail dans cette estampe.

    Bref aujourd'hui, il n'y a plus le marché aux poissons, mais le temple demeure est reste aussi connu pour son mémorial du guitariste de X Japan, Hide.

    Du Sud de Ginza vers Ryogoku en longeant la Sumida - partie 1

      Je n'ai plus la photo du Hongan-ji et sur place, j'ai pris une photo du pont Tsukuda oohashi mais dans la direction opposée, vers la Sky Tree.

     

    Du Sud de Ginza vers Ryogoku en longeant la Sumida - partie 1

    N°55 , 佃しま住吉の祭, Tsukudajima Sumiyoshi no matsuri, Tsukudajima et le festival Sumiyoshi

    Nous y voilà à Tsukudajima. Aujourd'hui située au Nord de la station Tsukishima.

     

    Son nom remonte au début du 17ème s. lorsque que Tokugawa Ieyasu y fit transférer du village de Tsukudamura 33 pêcheurs de shirauo, poisson servi à la table des shôguns (cf estampe ci-dessus).

    Ils auraient aussi eu pour fonction de servir de police secrète. Installés sur l’île, les pêcheurs y introduisirent le culte de la divinité du sanctuaire Sumiyoshi-jinja, protectrice des navigateurs.

    Le sanctuaire était célèbre grâce à son fujidana, sorte de tonelle sur laquelle on faisait grimper des glycines (fuji) dont on contemplait les fleurs en mai. Mais il est surtout célèbre grâce à son matsuri qui a lieu tous les 3 ans le 6ème jour du 8ème mois. On sortait l’énorme tête du lion shishi et les mikoshi étaient plongés dans la mer.  

    Du Sud de Ginza vers Ryogoku en longeant la Sumida - partie 1

    Tsukudajima vous donne l'impression d'être coincé dans une bulle temporelle. On ne revient pas à l'ère Edo, mais il y a un je ne sais quoi de ce qu'on imaginerait être le Tokyo d'antan. Le temple et les shishi y sont toujours, vous pourrez les observer tout au long de l'année.

    Du Sud de Ginza vers Ryogoku en longeant la Sumida - partie 1

    N°77,鉄砲洲稲荷橋湊神社, Teppōzu Inaribashi Minato jinja, Pont Inari et le temple Minato à Teppōzu

    Au premier plan, on peut voir les mâts de deux bateaux puis au loin le pont qui enjambe le canal Hatchobori. Ce canal traverse toute la ville avant de se jeter dans la Sumida et doit son nom justement parce qu'il fait 8 cho, soit 870m.

    Les canaux sont rarement profond, donc les bateaux déchargent leurs marchandises qui seront ensuite transportées jusque dans divers entrepôts que l'on aperçoit ici. Ce sont les bâtiments blancs de part et d'autre du canal.

    La clôture rouge abrite l'un des plus vieux sanctuaire shinto de la capitale : Inari jinja. Il se trouvait sur le banc de sable Teppozu ainsi nommé car on s'y entraînait au tir de canon.

    Il y avait aussi les demeures des maîtres d'Hatchobori : les yoriki et les doshin. Ils sont en bas de l'échelle des samouraï. Les premiers font partis du Conseil municipal, ils ont un salaire très bas souvent compensés par des pots-de-vin. Ils sont aidés les seconds qui servent de gardiens de la paix qui recrutaient eux-mêmes d'autres policiers parmi les habitants.

    Du Sud de Ginza vers Ryogoku en longeant la Sumida - partie 1

     

    Le temple est toujours là, le canal, le pont aussi.... pour les membres du conseil et les policiers véreux, je n'ai pas été vérifier.

     

    Du Sud de Ginza vers Ryogoku en longeant la Sumida - partie 1N°4,永代橋佃しま, Eitaibashi Tsukudajima, Tsukudajima et le pont Eitai

    L'amour d'Hiroshige pour les piles de pont !

    C’est une vue sur l’île depuis l’embouchure de la Sumida. Du pont, on ne voit qu’une de ses piles. C’est également un des plus anciens et un des plus grands de la Sumida, il serait d’après la légende, construit avec les restes du monastère Kan-eiji en l’an 2 Genroku.

    Il était souvent endommagé à cause des inondations et sa réparation demandait une forte dépense. Le gouvernement décida de le détruire ce qui provoqua un tollé parmi les habitants. Les dépenses furent prises en charge par les habitants via un droit de péage dont seuls les samourai, les moines et prêtres étaient exempts.

    Sur l’estampe, on peut voir une scène de pêche au shirauo. Pour attirer les poissons, on allume des feux la nuit.

     

     

     

     

     

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