• Kôshintô

    Le long des routes japonaises ou aux intersections,  vous trouverez des stèles ou des statues, la plus connue étant le jizô.

    Toutefois, il y en a d'autres que vous croiserez à coup sûr, que vous reconnaîtrez certainement d'ailleurs qui sont moins bien connues.

    J'aimerais faire un petit article sur certaines et commencer par le kôshintô.

    C'est le plus souvent une stèle avec un personnage qui ressemble à un mix entre un Conehead et un teletubbies/Oompa Loompa.

    A l'origine, il y avait une vraie croyance accompagnée de rites dont il ne reste peut-être aujourd'hui que des veillées et des repas.

    Ainsi pensait-on que les années de Singe de métal (d'où le nom dérive 庚申 kôshin signifiant singe de métal et 塔 tô tour, clocher, pagode), 3 vers qui vivaient dans le corps humain cherchaient à s'en échapper pour raconter au Dieu céleste combien leur hôte était malhonnête. En fonction des fautes, le dieu raccourcissait la vie de la personne, lui infligeait des maladie ou la tuait.

    Cette croyance a ses racines en Chine et c'est à partir de la dynastie Tang que la croyance prend de l'ampleur et que des textes informent de la façon de tuer ces maudits vers. Ne pouvant sortir que quand la personne dort, il suffit alors de la garder éveillée !...Pendant 7 jours....

    Ainsi cette pratique de veiller toute la nuit devint une coutume en Chine puis en Corée et enfin au Japon où elle arriva pendant la période Heian. Au début c'est surtout la cour impériale et en haut lieu l'Empereur qui s'y astreignaient (on retrouve la mention de la pratique dans le Dit du Genji).

    La croyance au Japon inclut alors un kami, une divinité Shômen Kongô et est composé un sutra.

    La diffusion parmi le peuple intervint pendant l'époque Edo avec la formation de groupes célébrant des veillées les kôshin-machi et la construction de monuments les kôshintô.

    Il fallait veiller toute la nuit (donc fiesta !!!). Sauf que si en Chine c'était accompagné de jeûne, d'abstinence et purifications/méditations pour tuer les vers, au Japon on retint essentiellement que c'était une occasion formidable pour se réunir et.... FIESTA !!! Enfin pas tout à fait, l'abstinence était recommandé car on pensait qu'un enfant dont la conception eut lieu lors de cette veillée deviendrait un voleur.

    De plus, au Japon, on n'attendait plus la venue de l'année du singe de métal pour ces veillées, elle se faisait alors tous les 2 mois !

    Un syncrétisme eu lieu en associant l'équivalent de Vajrapani alias Shômen Kongô, une divinité dotée de six bras et à la peau bleue, Saruta-hiko et les trois singes de la sagesse (Mizaru celui qui ne voit pas, Kikazaru qui n'entend pas et Iwazaru qui ne parle pas).

    Saruta-hiko est une divinité shintô qui est associé aux chemins et il est le gardien du pont du ciel. C'est pourquoi on retrouve les kôshintô au bord des routes et comme il garde le pont entre le terre et le ciel, il devait certainement empêcher les vers de remonter jusqu'au Dieu céleste.

    Pourquoi les petits singes me demanderez-vous, mis à part le jeu de mot facile. Ensemble ils ne voient, ni ne disent, ni n'entendent... cela agit comme une sorte de talisman qui fait que même si les vers allaient jusqu'au ciel, soit le Dieu céleste soit les vers ne pourraient communiquer ou comprendre quoi que ce soit.

    Enfin, le personnage principal est Shômen-kongô. Le modèle de base est un bodhisattva (un être qui a atteint l'éveil avant le Bouddha dans la tradition hindoue) qui s'appelle Vajrapani. C'est un peu le cousin indien d'Hercule, il a une massue et possède une grande force. Par contre, contrairement à Hercule, il possède la sagesse. Il est censé tenir à distance les démons mais c'est aussi un maître des secrets. Dans certaines traditions, il commande la pluie que l'on croyait causée par des serpents. Enfin, quand il est associé à Vishnou, il protègent contre les maladies.

    Secret = les vers ne peuvent rien rapporter au Dieu Céleste.

    Maître des serpents = domine les vers

    Protecteur des maladies combo éloigne les démons = garde les personnes saines et sauves en évitant les représailles du Dieu céleste.

    Sur ces fameuses stèles vous pourrez voir le plus souvent au centre Shômen-kongô.

    Bien que les représentations peuvent fortement différer, on peut retrouver les éléments suivant : Au-dessus de lui, le soleil et la lune. A ses côtés des coqs (c'est pour les gens qui ne savaient pas lire, ils pouvaient en conclure avec la présence du singe et du coq que c'était lié au culte Kôshin et à sa veillée qui se faisait le jour du coq). Sous ses pieds un démon qu'il écrase et plus bas, les 3 petits singes.

    La divinité elle-même est... moche. En fait, elle ressemble à un démon avec des canines, les cheveux ébouriffés, un joli collier de crânes parfois (c'est ça quand on est à court de farfalle et de coquillettes) et il a 6 bras tenant des attributs différents. Pourtant ce n'est pas un démon car il n'a qu'un visage d'où son nom de Shômen, et il porte un pagne alors que les démons doivent porter des fundoshi (je vous laisse chercher ce que c'est si vous ne connaissez pas ce mot). Pour les attributs, il y a une épée, un arc, une flèche, une roue, un trident, un serpent, une figure féminine agrippée par les cheveux, parfois il prie avec deux mains devant et les 4 autres portant des objets.... bref, 6 bras = beaucoup de possibilités et de créativité pour exterminer 3 malheureux vers.

    Kôshintô

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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